L’été touche bientôt à sa fin sur nos paysages agricoles. Tandis que la récolte du tournesol et le travail du sol ralentissent progressivement avec l’arrivée de l’automne, nos campagnes laissent peu à peu entrevoir de nouvelles cicatrices, bien différentes des traditionnels sillons de labour ou vastes étendues soumises aux pesticides. Bien qu’invisibles aux yeux des moins initiés, c’est au niveau du comportement des oiseaux que les conséquences commencent à se manifester.
Ancrée dans les traditions depuis des décennies, l’agriculture conventionnelle impacte pourtant l’activité et les réponses des passereaux face aux prédateurs. Ce sont en effet les résultats constatés par une équipe de recherche française au cours du printemps 2019. Tandis que la capture des oiseaux à l’aide d’un filet japonais a permis la simulation d’une attaque de prédateur, les 20 haies prospectées ont permis de confronter agriculture conventionnelle et agriculture biologique au sein d’un site de près de 435 km2 localisé dans le centre ouest de la France. A ce titre, 10 haies étaient entourées de paysages d’agriculture biologique et 10 autres étaient bordées de paysages d’agriculture conventionnelle.
Sur les 6 espèces de passereaux les plus capturées, dont le domaine vital variait de 0.2 à 0.8 ha autour des haies sélectionnées, toutes présentaient une vigueur et une agressivité plus importante lorsqu’elles provenaient d’environnement d’agriculture biologique. Les tentatives de fuite, l’attaque des doigts du bagueur ou les appels de détresse lors de la capture étaient significativement plus nombreux chez ces individus, témoignant alors d’une disponibilité en énergie plus importante que chez les individus provenant d’environnements d’agriculture conventionnelle. Ces derniers étant plus fréquemment exposés aux pesticides, il est en effet probable que leur physiologie, leur réactivité et leur coordination soient altérées, réduisant inévitablement leur chance de survie en cas d’attaque. Il a notamment été démontré que plusieurs familles de pesticides, notamment les carbamates et les organophosphates, inhibaient l’acétylcholinestérase, une enzyme clé du système nerveux. Les réserves énergétiques, également dépensées dans la lutte contre les substances chimiques, seraient alors de moins en moins allouées à la recherche de nourriture en période de reproduction, impactant inévitablement la croissance des oisillons.
Références : Moreau, J., Monceau, K., Gonnet, G., Pfister, M., Bretagnolle, V., 2022. Organic farming positively affects the vitality of passerine birds in agricultural landscapes. Agriculture, Ecosystems & Environment, 336.
Elodie Massol